Commerce international et protection de l’environnement
Pendant longtemps, le commerce international et la protection de l’environnement ont été appréhendés de manière isolée. Dans les quarante premières années de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT), les problématiques environnementales furent absentes au moment de la conclusion des principaux accords régionaux[2]. Par ailleurs, l’environnement n’était pas à l’ordre du jour lors des assises du GATT tenues du 15 au 20 septembre 1986 à Punta del Este en Uruguay[3]. Les pays industrialisés ont donc développé leurs économies en marge des considérations environnementales. Cette industrialisation, combinée au développement des nouvelles technologies, a grandement contribué à la détérioration de l’environnement. Cela étant, l’épuisement des ressources naturelles, la récurrence des catastrophes dues aux changements climatiques ont conduit plusieurs pays à faire des efforts pour réorienter au fil du temps leurs modèles économiques. Ainsi, les modes de surproduction et de consommation de masse ne pouvant
perdurer, des plaidoyers et des négociations multiformes ont soutenu l’impératif de la transition écologique en migrant vers une économie plus vertueuse, dite « économie verte ». Considérée comme un processus innovant qui ambitionne d’atteindre le développement durable, l’économie verte est une stratégie constituée de multiples réflexions politiques et de plans d’action variés visant à promouvoir un nouveau paradigme de développement. Elle est basée sur une véritable intégration des trois piliers – économique, social et environnemental – du développement durable[4].
Pilier essentiel de l’économie verte, et donc du développement durable, la protection de l’environnement occupe aujourd’hui une place de choix dans les accords commerciaux internationaux. Une récente étude[5] a constaté que les accords commerciaux incluent de plus en plus des dispositions environnementales. Certains leur consacrent même un chapitre entier. Cette tendance semble se confirmer lorsqu’on se réfère à certains traités, à l’instar de l’Accord économique commercial global (AECG)[6] entre l’Union européenne et le Canada, qui tente par une modernisation écologique de se faire accepter. Fortement décrié par les sceptiques du libre-échange, il a davantage mobilisé sur les questions liées à son impact environnemental que sur les retombées économiques qui en découleraient. Cette prééminence de l’environnement se reflète-elle aussi dans l’Accord portant création de la zone de libre-échange continentale africaine?
Nous allons passer en revue les dispositions environnementales de l’Accord africain, les comparer avec celles d’autres accords de libre échange, puis étudier les outils mobilisables pour la préservation de l’environnement dans ce contexte.
L’Accord portant création de la ZLECAF
L’Accord portant création de la zone de libre-échange continentale[7] contient trois protocoles et une annexe. Le Protocole sur le commerce des marchandises aborde la question de la non-discrimination en rappelant aux États les règles applicables au traitement de la nation la plus favorisée. Il aborde aussi la question du traitement national des produits importés d’autres États membres et celle du traitement spécial et différencié. Dans une troisième partie, ce Protocole aborde la question de la libéralisation du commerce en encadrant les droits à l’importation. La question de l’élimination générale des restrictions quantitatives et de la règle d’origine y est également évoquée. Dans une quatrième partie, la coopération douanière, la facilitation des échanges et le transit sont traités. Enfin, les autres parties se penchent sur les mesures correctives commerciales, les normes et les règlements applicables aux produits, les politiques complémentaires, les exceptions, l’assistance technique, le renforcement des capacités et la coopération, de même que des dispositions finales. De plus, l’Accord dispose d’un Protocole sur le commerce des services qui aborde des questions liées aux pratiques commerciales anticoncurrentielles, aux monopoles et fournisseurs exclusifs de service. Enfin, le Protocole sur les règles et procédures relatives au règlement des différends s’intéresse à l’organe de règlement des différends, notamment à sa composition, ses prérogatives et à l’établissement de l’organe d’appel et des groupes spéciaux.
[2] Ph. Bontems et M.-F. Calmette, « Mondialisation, commerce international et environnement. Un avant-propos », Revue économique,
2010/1 (61), pp. 1-8.
[3] M. Damian et J. Graz, « L’Organisation mondiale du commerce, l’environnement et la contestation écologique », Revue internationale
des sciences sociales, 2001/4 (170), pp. 657-670.
[4] A. M. Bassi, Économie verte. Guide pratique pour l’intégration des stratégies de l’économie verte dans les politiques de développement,
Québec, Institut de la Francophonie pour le développement durable, 2015.
[5] J. F. Morin, L. Mordelet et M. Rochette, « L’environnement dans les accords commerciaux canadiens », Options politiques, 2017.
[6] Affaires mondiales Canada, Accord économique et commercial global, 2016.
[7] Union africaine, Accord portant création de la zone de libre-échange continentale africaine, 2018.
Franck Lévy Moussavou pour la revue RADE sous encadrement de Organisation internationale de la francophonie